Jean Lugrin nous raconte en texte et album photos trois générations d’institutrices venues à la rencontre des enfants de l’école des Diablerets, le 13 février dernier. Parmi elles, Germaine de Crousaz qui va fêter ses cent ans en juin prochain.
A mi 2020, elle fêtera ses cent ans, et on aime la voir passer dans les rues du village avec ses deux bâtons de marche. Mais ce jeudi matin, elle a rendez-vous à l’Ecole des Diablerets. Enfant, elle y a vécu, son père y était le régent. Maintenant, Germaine de Crousaz s’y retrouve, entourée d’une kyrielle d’écoliers, assis à même le sol, subjugués par les souvenirs de cette ancienne institutrice. L’enveloppe du collège a été fort heureusement maintenue. Quel privilège, cette petite école à échelle humaine, avec son clocher ! Les transformations intérieures ne ressemblent plus du tout à la situation initiale. Germaine explique à l’assistance sa vie d’alors. La scolarité débutait à sept ans, trois ans plus tard qu’aujourd’hui. Connaissant les chants, son père l’autorisait à participer avec ses «vieux» camarades, deux ans avant l’âge légal. Des chants, il y a eu, mais on est à l’époque du karaoké. Les paroles s’inscrivent sur le tableau noir. Mais non, cela aussi, c’est fini, c’est un énorme écran piloté par ordinateur. Fini aussi l’odeur de la craie, et son affreux crissement qui insupportait la maîtresse. Parlons en des maîtresses. Dans la salle, il y a évidemment Germaine, venue avec sa fille, rythmicienne, Il y a Solange, qui a fait presque toute sa carrière dans la Commune, et il y a Christine, ancienne élève de Solange, enseignante actuelle. Elle est entourée par les autres membres du corps.
Qu’est-ce que ça veut dire cent ans ? Combien de bougies à souffler ? Dix enfants de dix ans entourent Germaine. Il faut bien qu’elle s’exerce à souffler ! Du souffle, elle en a encore, pour raconter l’histoire des trois jeunes boucs risquant de se faire dévorer par un troll affamé voulant les empêcher de rejoindre l’alpage d’été. Puis, elle fait une démonstration de son psaltérion. Y aurait-il quelques ignares, comme moi, ne connaissant cet instrument à cordes, datant du Moyen Age, qui peut se jouer soit avec un archet, soit à l’aide d’un plectre. Elle interprète deux chansons. Quelle forme, quelle vitalité ! Quel beau moment pour tous les présents ! Et quelle leçon de vie pour la quarantaine d’enfants ! Vraisemblablement aussi pour les plus vieux ! Merci Germaine, et encore plus longue vie !
Jean Lugrin – 15 février 2020
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