Rencontres Eco.villages aux Diablerets: Bertrand Piccard a livré quelques réflexions sur les infrastructures du site

Texte et photos Christophe Racat

L’avenir des villages de montagne, et par extension, celui des communautés rurales du monde entier, passent-t-il par les Diablerets? Le 29 août, Bertrand Piccard a parlé de son amour pour les Diablerets, sans oublier quelques bémols, lors de la deuxième édition de « Shift to Green », désormais rebaptisée « eco.villages ». L’événement était organisé par ECOS, plus grand cabinet de conseil suisse pour le développement durable, situé à Bâle. Et présenté par Michael Liebreich, co-fondateur du forum et CEO de Bloomberg New Energy Finance, et Daniel Wiener, co-fondateur d’eco.villages, CEO d’Ecos.

Tout au long de la journée, les débats ont fait prendre conscience (si ce n’était pas déjà le cas), de la relative précarité de notre société actuelle, face notamment à l’explosion démographique et à la surexploitation de notre planète.

Mais l’intervention qui a sans doute le plus marqué l’auditoire et les gens de la vallée présents dans la salle de la Maison des Congrès, a été le discours de Bertrand Piccard, initiateur, président et pilote de Solar Impulse. En présence du syndic d’Ormont-Dessus, Philippe Grobéty, ainsi que du directeur des remontées mécaniques, Jean-Paul Jotterand, Bertrand Piccard a parlé des Diablerets avec son coeur avant tout, en tant qu’hôte de longue date de la station. Il s’est exprimé en toute franchise, concernant les remontées mécaniques, les réalisations passées; telle que la liaison Diablerets-Villars: une « remontée mécanique » à plat qui n’a créé aucune piste de ski, mais traverse un vallon sauvage. Plus préoccupante, la situation actuelle d’Isenau et de sa télécabine. Bertrand Piccard se pose la question de la réelle utilité d’un départ aux Isles, de même qu’une liaison directe au Glacier. Il prône plutôt de conserver l’actuel départ d’Isenau, maintenant ainsi la fameuse piste de la Standard qui mène jusqu’au village. Il verrait aussi un arrêt intermédiaire sur l’installation rénovée, ce qui permettrait d’utiliser le tracé de la standard dans sa partie supérieure, lorsque les conditions ne se prêteraient plus à y skier en son entier. L’aérostier a aussi évoqué la liaison entre Isenau et le col du Pillon, pour accéder au glacier des Diablerets et à son fameux domaine freeride que lui et de nombreux pratiquants apprécient beaucoup. Il regrette que sa faisabilité soit compromise par arguments écologiques quelque peu exagérés. Bertrand Piccard a spontanément proposé son aide pour les discussions futures.

Parmi les autres intervenants marquants: Mathis Wackernagel, président and Founder, global Footprint Network, qui a su, avec des mots relativement simples, décrire la situation des pays industrialisés et leur façon de consommer plus que ce qu’offre chaque territoire concerné. Il a esquissé les grandes lignes de solutions à mettre en oeuvre sans plus tarder.

Se sont notamment exprimés: Olga Vasquez Ruano (The Mexico Project) consultante en développement urbain. Jérôme Christen, directeur romand de l’Agence des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Jean-Marc Udriot, syndic de Leysin, président de la CITAV ( Communauté touristique des Alpes vaudoises). Jean-Marie Schlaubitz, responsable du projet Diablerets vert. Laurent Balsiger, directeur de l’énergie pour le Canton de Vaud.

A noter l’intervention d’Aline Choulot, ingénieure de projet chez Mhylab, laboratoire de petite hydraulique, à propos de la production d’électricité issue des petites centrales hydrauliques, qui risque d’être considérablement freinée par la révision de l’ordonnance sur l’énergie, récemment émise par le Département fédéral de l’Environnement (DETEC).       Ch. R.

Philippe Grobéty, syndic d’Ormont-Dessus et député, répond à Bertrand Piccard

En parlant d’Isenau, Bertrand Piccard donne un avis très clair : pour lui, le départ aux Isles n’a de sens que si nous faisons une station intermédiaire en haut de la zone chalets. La municipalité a toujours dit que la réalisation de cette station intermédiaire permettrait de faire du ski répétitif sur deux pistes et serait une vraie valeur ajoutée au domaine d’Isenau. Mais, dans ce dossier, ce qui est primordial pour la survie de l’économie de montagne de notre village est de maintenir le domaine skiable d’Isenau. Même si nous avons bon espoir d’y arriver, ce maintien n’est pas encore garanti. Nous n’oublions pas pour autant la station intermédiaire qui ne pourra se faire que si nous en trouvons le financement. Son coût est estimé à 3 millions de francs.

L’avis de Bertrand Piccard sur le domaine skiable du Glacier est aussi compréhensible. Il est vrai que la descente entre le Sex Rouge et le col du Pillon est très utilisée par les skieurs hors pistes et que la municipalité se bat depuis plusieurs années pour inscrire cet itinéraire dans le plan d’affectation des pistes du Glacier afin de pouvoir sécuriser le passage de la Vire aux Dames. Il faut toutefois savoir que, malheureusement, les skieurs ne sont pas les principaux clients du Glacier. C’est en effet la clientèle d’été qui est primordiale à Glacier 3000 pour essayer d’avoir des comptes équilibrés. C’est pour cette raison que la société désire obtenir un accès au Glacier depuis le village des Diablerets. Si ce départ devait se réaliser, les TPC prolongeraient l’ASD de quelques centaines de mètres afin que l’Arc lémanique soit, via les transports publics, à portée du Glacier. Etant skieur, je comprends les préoccupations de Bertrand Piccard. Je pense toutefois que si, avec un départ aux Diablerets, nous arrivons à aménager un itinéraire à ski entre le col du PIllon et le village, les “freeriders” continueront sans hésiter à dévaler les 8 couloirs des Pierres-Pointes.

Le forum « Eco.villages » n’était pas censé être le cadre pour parler du dossier Alpes Vaudoises 2020. Le fait que Bertrand Piccard profite de la tribune qui lui a été donnée pour aborder ce sujet montre bien à quel point les habitués des Diablerets sont inquiets pour l’avenir économique de notre village. La municipalité partage cette inquiétude. Nous devons renouveler nos infrastructures si nous voulons maintenir les places de travail et l’économie touristique au niveau où elle est aujourd’hui. Le dossier des remontées mécaniques est très complexe et doit tenir compte d’une grande quantité de paramètres. L’avis de Bertrand Piccard est partagé par beaucoup de skieurs et nous devons les écouter et répondre à leurs craintes. Je rappelle, d’ailleurs, que la Municipalité, moi-même ou Jean-Marie Schlaubitz, Président de la task force Isenau, sommes à disposition des habitants et résidents de la commune pour expliquer les enjeux et répondre à aux questions.

Ph. G.

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