Concert à l’église catholique des Diablerets du 27 décembre 2015

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Les auditeurs commencent à entrer, bien à l’avance. Deux cornistes chauffent leur instrument derrière la sculpture qui contient l’eau bénite, alors qu’un autre musicien a sorti son thermos et s’hydrate. Un quatrième lit, concentré. De ma place je ne peux dire s’il s’agit de la partition réduite au format livre de poche ou d’un roman érotique. Un orgue positif trône au beau milieu de la scène moins sainte ce soir là. A sa gauche une contrebasse repose sur une chaise, avant l’effort. Musiciens et auditeurs arrivent les uns après les autres. A 18:15, nous entendrons quelques cantates (BWV 36, 133 et 65) de mon vieil ami Jean-Sebastien Bach (1685-1750). Œuvres magistrales qui seront interprétées par l’Ensemble vocal et instrumental de l’Arc lémanique.

L’année dernière, je m’étais déjà rendu dans cette église catholique des Diablerets pour entendre d’autres cantates, tirées de l’Oratorio de Noël. Je me préparais à la corvée, me sentant une peu obligé de me farcir un autre concert que ceux que nous organisons dans le cadre du Festival MN. Je suis sorti de là, comme on dit chez nous, déçu en bien. Les musiciens et les choristes étaient de bon niveau et j’ai été particulièrement impressionné par la voix de la basse. Cette fois, je m’y rends par plaisir, Bach étant numéro un dans le classement de mon cœur, même si je m’attends à quelques imperfections, la ferveur les gommera certainement aisément.

Le concert commence. Je connais la Cantate presque par cœur. Si je pouvais chanter toutes les voix, je me joindrais à eux, mais ma connaissance n’est pas le fruit d’un long travail de répétitions multiples, je connais d’instinct et aussi de les avoir toutes écoutées à maintes reprises. Dès quatre heures du matin, installé devant mon écran tactile, le casque sur les oreilles, je me gave des Cantates de Bach, ma nourriture spirituelle, ma prière matinale. Ces Cantates me portent, elles m’aident à tenir le coup dans cette guerre contre l’ignorance, dans ce combat permanent contre l’inculture. Ces Cantates sont bouées de sauvetage, défibrillateur, geste de premier secours. Elles sont aussi le témoignage de l’existence d’un Etre Supérieur qui a géré ce monde pourtant pourri par nos soins, corrompu par notre avidité, et pourtant si génial, mais dans lequel il est si difficile de trouver sa place, surtout la bonne.

Aïe ! La Soprano force sa voix, elle trébuche, le violon dérape, le chœur n’est pas synchrone, et alors ? Ce n’est pas un CD, c’est un concert en vrai, avec toutes ses imperfections, avec toute sa perfectibilité, avec tout son amour de la musique, de la pratiquer en groupe. On construit, on aime. On est bien loin d’un Etat bidon islamique, on est entre gens de bonne volonté, on célèbre Noël.

Je ne suis pas habilité à donner le jugement infaillible du critique musical incollable, mais j’ai trouvé, une fois de plus, que celui qui désire se consacrer plus au chant, cette basse magnifique, à bien raison de le faire, c’est si beau !

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Texte et photos Jean Lugrin

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